jeudi 23 juin 2011

Black-out - Sam Mills

Black-out de Sam Mills
Naïve, 2010.

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Je n'avais plus peur qu'on me demande de lire à haute voix. J'avais un secret: un exemplaire du vrai Sa Majesté des mouches, brut, non censuré, posé comme une bombe au fond de mon casier. J'ai regardé Jasper et j'ai pensé: Je lis des choses que tu vivras toute ta vie sans jamais t'en apercevoir. Cela réveillait une sensation que je ne connaissais plus depuis longtemps: l'absence de peur. 

Stefan, seize ans, vit avec son père, libraire, dans une Angleterre qui a bien changé : des attentats terroristes ont conduit l’Etat à une politique sécuritaire effrayante. Sous prétexte de protéger les citoyens, le gouvernement les contrôle en permanence, les privant de toutes leurs libertés. Les livres sont les premières victimes de ce climat de terreur : tous les classiques de la littérature sont réécrits, expurgés de ce qui risquerait de « corrompre les esprits »… La conscience de Stefan est tiraillée lorsqu’il découvre que son père cache un supposé terroriste… Et son esprit est troublé lorsqu’il se met à lire, pour la première fois, des livres interdits, dont il ne connait que les versions « officielles ». Une découverte bouleversante…

Ce roman d'aventures haletant, aux multiples rebondissements, fait apparaître la lecture comme ce qu'elle est fondamentalement: un acte libérateur, mais aussi un acte de résistance. 

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Lors d'un passage éclair dans la librairie Gargan'mots, je pose ma question préférée pour tous les libraires que je croise dans un rayon jeunesse: Vous avez une nouveauté, un coup de cœur du moment en littérature pour la jeunesse ? Elle me conseille Black-out. Je n'hésite pas une seconde. Ma libraire a toujours été de bons conseils. 
Je ne fus pas déçue par ce roman. Il est écrit à la première personne du singulier, avec comme personnage principal: Stefan. L'intrigue se déroule dans un monde qui pourrait tout à fait correspondre à notre futur. Les lois anti-terroristes ont été poussées jusqu'à l'exagération, jusqu'à rendre l'Etat persécuteur. Il est dérangeant et déroutant de lire la description d'une société, qui ne me convient pas du tout personnellement (la censure littéraire avec la ré-écriture des classiques, la video-surveillance continuelle, le couvre-feu ...), mais comment savoir si la société actuelle ne dérivera pas vers cet extrême ou la liberté ne signifie plus grand chose. 
Le roman tout en racontant les problèmes de Stefan, à la recherche de son père, amène le lecteur à s'interroger sur la Lecture, sur le rôle que peut tenir l'écrivain comme messager d'idées, sur le contrôle de la population par l'Etat, sur la liberté d'expression, sur le terrorisme.

Ce roman est à la limite du roman jeunesse à mon avis. Il faut avoir une certaine connaissance ou conscience de la société pour comprendre toutes les allusions faites par l'auteur. Un adulte ne s'ennuiera pas du tout. D'ailleurs je le recommande à tous les adultes, l'âge du héros importe peu. 
Pour ce qui est de la jeunesse... Tout dépend bien sûr du lecteur, mais avant 14-15 ans ça me paraît compliqué. Un autre argument à cette limite d'âge, l'histoire est dure, dans le sens où Stefan doit se défendre contre la violence de l'Etat, et où le terrorisme est rarement fleur-bleue.

Petit bémol: L'épilogue. Il est inutile à mon avis. Il n'apporte rien de plus, à part peut être une inscription dans la jeunesse, en tutoyant et interpellant le lecteur. Un peu de "Toi aussi tu es le héros de cette histoire". Vraiment inutile...

Coup de cœur: Les références littéraires: pp. 90-91
- Écoute-moi bien. tout ce qu'à fait Omar Shakir, c'est dépeindre des personnages -des personnages de fiction- qui préparent un attentat. Avant de comprendre ce qu'il lui arrivait, il était arrêté et presque lapidé à mort. Shakespeare aurait-il dû être pendu pour avoir créé Macbeth, cette tueuse en série? Faut-il juger J.K. Rowling pour avoir encouragé les enfants à s'intéresser à la magie ? Une histoire, c'est une histoire.

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